Visite du chantier de fouilles du Vialat
Localisation du chantier de fouilles à Boissières
Ces fouilles ont été faites par Mosaïques Archéologie, opérateur basé à Cournonterral (34), suite au diagnostic archéologique (sondages) réalisé en 2020 par l’INRAP.
Ce chantier se situe à Boissières, au lieu-dit « le Vialat ». Ce quartier se nommait “Le Vielar” au milieu du XVIe siècle, ce qui signifie « le hameau ».
Le chantier a débuté le 15 février 2021 et devait se terminer le 9 avril 2021. Il a été prolongé de 15 jours, jusqu’au 23 avril, suite à la forte densité de vestiges trouvés sur place : 230 structures archéologiques ont pu être comptées sur l’ensemble du site.
L’emprise du projet d’aménagement du lotissement est de 4,5 hectares. Par contre l’emprise de fouille était de 6 000m2.
Ces fouilles ont permis de mettre au jour :
a) sur la partie basse du terrain
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entre 80 et 90 silos médiévaux, profonds de 1 à 2 m, et d’un volume de 2 à 3 m² chacun, datant du haut Moyen Âge (entre la fin de l’Antiquité, 476, et le Moyen Âge central qui débute au XIe siècle)
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13 fonds de cabane (construits en matériaux périssables)
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1 bâti en dur du Xe siècle
b) sur la partie haute du terrain, au ras de la pinède
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1 site bâti, 500 ans plus ancien, datant du Haut-Empire romain (entre 27 avant J-C et 192 après J-C)
1. Aire d’ensilage
(dans le Midi européen, ce sont de vastes sites médiévaux dédiés au stockage des récoltes en silos)
Cette aire d’ensilage remonte au haut Moyen Âge (entre le VIIe et le IXe siècles).
Les silos, dont certains peuvent atteindre 1,90 m de profondeur, sont en forme d’ampoule, avec un goulot fermé par un bouchon (une pierre calcaire ronde), et une chambre de stockage (voir schéma ci-dessous).
Ils ont été comblés définitivement avec de la terre et des cailloux aux alentours du Xe siècle.
Leur durée d’utilisation est difficile à estimer mais peut s’étaler sur un demi-siècle.
Ils servaient à stocker le grain qui pouvait se conserver environ 1 an. Mais lorsque le silo était ouvert, tout le grain devait être utilisé rapidement.
On ne sait pas si ce grain était destiné à la vente ou à la transformation.
Ces silos étaient creusés dans la terre, jamais bâtis.
Les archéologues les repèrent facilement parce qu’ils étaient creusés dans de la terre jaune (substrat Miocène), et rebouchés avec de la terre plus foncée.
Un silo hermétiquement fermé a été retrouvé, mais il était vide.
2. Fonds de cabane
Ces fonds de cabane datent du haut Moyen Âge (période du VIe au IXe siècle).
Ce sont les seules traces qui restent de constructions légères en matériaux qui se dégradent avec le temps.
L’ensemble de cet établissement médiéval était entouré d’un drain pour évacuer l’eau qui descendait de la colline, et protéger ainsi les silos de l’humidité.
Une centaine de fonds de cabane sont répertoriés dans le Languedoc et 13 sur ce chantier de fouilles, ce qui témoigne de l’intérêt scientifique du site du Vialat à Boissières.
Comme le montre l’illustration ci-dessus, les cabanes étaient des structures d’habitat léger.
Les murs étaient en terre, la charpente en bois et la toiture en matériaux périssables.
Un plancher en bois était construit sur une cave ou un vide sanitaire, accessible par une trappe, servant à la conservation des denrées alimentaires de consommation rapide. Ces denrées étaient stockées dans des vases ou des tonnelets (voir dessin ci-dessous)
Le fond de cabane dégagé sur la photo de gauche ci-dessus montre en négatif l’implantation des 8 poteaux de la cabane, que l’on voit distinctement sur la photo de droite.
Quelques poteries cassées ont été trouvées : vases, urnes et marmites datant du VIe siècle.
Les archéologues cherchent à comprendre pourquoi il y a quasiment 2 siècles d’écart entre l’abandon de certains fonds de cabane et le comblement définitif des silos.
3. Bâtiment Haut-Empire romain
(entre 27 avant J-C et 192 après J-C)
Ce bâti a été mis au jour sous 20 cm de sédiments car il est situé au début de la pente sous le château, à la limite de la pinède.
Il est construit en pierres équarries (taillées de façon succincte, pour rendre les angles à peu près droits).
Des fragments de cruche et de dolium ont été retrouvés ainsi qu’un seuil de porte gallo-romain proche de sa position initiale.
Sur le côté du bâti, on peut voir 2 petites cellules et une sépulture d’immature inhumé (enfant de 5 à 10 ans).
En l’état des recherches, il est impossible de connaître la fonction de ce bâti romain.
4. Four culinaire extérieur
Il est daté entre le IVe et le VIe siècles (haut Moyen Âge). Il se compose :
– d’une chambre de chauffe circulaire sur un radier de fondation
– devant, l’alandier pour enfourner les braises chaudes
– devant l’alandier, une petite fosse appelée cendrier.
Autour du four ont été trouvés des fragments d’os d’animaux, notamment une mâchoire de gros mammifère (cheval ou bœuf?)
5. Trace de bâti médiéval
Il est daté du VIe/VIIe siècle.
Pour l’instant, les archéologues n’ont aucune idée sur la fonction de ce bâti, de petite taille, donc pas à usage domestique, qui occupe une place centrale sur le site.
Il est composé d’une seule pièce.
6. Structure bâtie
Elle est postérieure au Xe siècle. Les murs sont faits avec des blocs taillés. Elle est composé d’une unité domestiques avec 2 cellules équivalentes.
On y observe le phénomène de réemploi : dans les murs, on trouve des fragments d’autel funéraire datant du 1er siècle (contemporain de la Maison Carrée)
Le fragment de pierre (photo de droite) est un décor en rinceau (motif ornemental constitué d’une arabesque de feuillages, de fleurs ou de fruits sculptée ou peinte servant d’ornement en architecture ou dans les arts décoratifs) avec frise.
À proximité, un seuil de porte en calcaire tendre exogène (ne provenant pas des environs), photographié ci-dessous, a été trouvé dans un fond de cabane abandonné dans le courant du VIIe siècle.
Les traces de taille sur l’avant, ainsi que des ancrages sur le côté, sont nettement visibles sur la photo.
Une fois les fouilles terminées, l’équipe archéologique travaillera sur les vestiges récupérés (ossements, tessons divers, terre des silos, etc) pour approfondir leurs recherches.
Les résultats des recherches de terrain et des recherches en laboratoire devraient être publiés par Mosaïques Archéologie dans 2 ans.